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par
Christophe PAILLARD
L’Institut et Musée
Voltaire célèbre son cinquantième anniversaire
- occasion rêvée de revenir aux sources pour se projeter
dans l’avenir ! Depuis sa naissance, l’IMV répond
à une triple vocation. Il est d’abord la bibliothèque,
riche de manuscrits et d’imprimés, qui offre aux
dix-huitiémistes le cadre idéal de leurs recherches.
Il est ensuite l’institution muséale qui expose aux
« Délices », si justement nommés, des
collections propres à fasciner tout vrai voltairien –
le public a récemment apprécié Voltaire
et la Chine (2003) et Voltaire à l’opéra
(2004), préludant Tremblez, terriens !, exposition
sur Voltaire et le tremblement de terre de Lisbonne, qui commémorera
en 2005 le séisme ayant bouleversé l’évolution
intellectuelle du philosophe. L’IMV est enfin le lieu de
publication d’études savantes, à commencer
par l’indispensable correspondance intégrale de Voltaire.
Force est cependant de reconnaître que l’Institut
a délaissé ce troisième aspect de sa vocation
depuis les années 1970, qui virent la
translation à Oxford des
« Etudes sur Voltaire et le dix-huitième siècle
»
Pour réaffirmer cette
tradition en l’occasion de son cinquantième anniversaire,
l’IMV lance, en 2005, une nouvelle collection
d’études voltairiennes
: les
« Voltairiana ». Si plusieurs ouvrages sont en préparation,
le premier volume de la collection sera dédié à
Jean-Louis Wagnière (1739-1802), le secrétaire de
Voltaire. On pourra juger paradoxal que les Voltairiana s’ouvrent
sur celui qui écrivait en
1781 :
« je ne prétends point du tout faire un Voltairiana
», mais ce paradoxe n’est qu’apparent. Nul n’est
mieux placé que Wagnière pour témoigner des
singularités de la vie et de l’œuvre de Voltaire.
Entré à son service dès 1754, le plus loyal,
constant et dévoué de ses secrétaires s’imposa
très vite comme le rouage crucial de sa machine éditoriale.
Inlassable copiste qui endossait la paternité des écrits
que son maître ne souhaitait pas assumer, administrateur
et comptable de ses intérêts, intermédiaire
des affaires délicates, homme de confiance et, en un mot,
factotum et ami de Voltaire, il fut légitimement recommandé
à Catherine II en septembre 1778 comme « le seul
dictionnaire vivant de tout ce qui tient aux 24 dernières
années de l’homme le plus célèbre de
notre temps ». Curieusement, aucune monographie ne lui est
consacrée. Si sa correspondance avec Voltaire a été
depuis longtemps publiée par Beaumarchais, Beuchot ou Besterman,
la plupart de ses autographes restent inédits. Ce silence
de la recherche est d’autant plus surprenant que ses lettres
jettent une lumière nouvelle sur l’histoire du «
Voltaire d’outre-tombe », sans laquelle nous ne saurions
comprendre les modalités par lesquelles s’est constitué
un mythe toujours vivace. L’IMV conserve une importante
série d’autographes wagniériens inédits,
qui couvrent la période de 1778 à 1780, point de
départ de la destinée du Voltaire post mortem.
Ce premier volume des Voltairiana
s’intitule : « Adieu Ferney. Jean-Louis Wagnière
ou les deux morts de Voltaire ». La mort physique de Voltaire
le 30 mai 1778 fut en effet suivie d’une seconde mort, symbolique,
voyant la destruction de tout ce qu’il avait créé
durant les vingt ans de son établissement à Ferney.
En moins de six mois, la bibliothèque est cédée
à Catherine II, le château au marquis de Villette,
les manuscrits à l’éditeur Charles-Joseph
Panckoucke ; le domaine agricole est démembré, les
industries horlogères s’effondrent, et le village
qui avait été « l’Auberge de l’Europe
» ou le lieu de pèlerinage des personnalités
les plus renommées du monde des arts, des sciences et des
lettres, connaît un
lent et
inéluctable
« engourdissement ». « Adieu Ferney ».
L’expression nostalgique traduit le désarroi et l’impuissance
de Wagnière devant le brutal effondrement du « village
de la création voltairienne », délaissé
par l’héritière de Voltaire, Mme Denis, qui,
excédée, s’exclama en septembre 1778
qu'elle voudrait que « le feu fût à Ferney.
» Presque toujours empreintes de mélancolie, les
lettres de Wagnière permettent de suivre au jour le jour
la liquidation de la succession de Voltaire. Elles livrent d’importantes
précisions sur le sort de la bibliothèque, riche
de près de 7000 ouvrages, qu’il accompagna et installa
à Saint-Pétersbourg en 1779, en témoignant
notamment de la soustraction de livres, ordonnée par Mme
Denis contre la volonté de l’Impératrice de
toutes les Russies. Elles contribuent également à
éclairer la ténébreuse histoire des manuscrits
de Voltaire, dont Panckoucke prit livraison en août 1778.
Entre autres aperçus, Wagnière propose le seul inventaire
connu de ces papiers, inventaire resté inédit jusqu’à
ce jour. Agent de Panckoucke jusqu’en 1783, il contribua
de son expertise et de ses papiers à l’établissement
de l’édition de Kehl. Aussi n’est-il pas exagéré
de le considérer comme le premier « voltairien »
si l’on entend par ce terme un dévouement quasi-inconditionnel
à la personne et à l’œuvre de Voltaire.
N’est-il pas dès lors le personnage le mieux à
même d’ouvrir une collection d’études
voltairiennes ? Souhaitons, avec ce livre, une riche et longue
postérité aux Voltairiana : il était temps
que l’IMV renoue avec sa tradition éditoriale.
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