« La vie est une rivière, elle coule indéfiniment comme le temps, comme l'éternité ». Ces paroles poétiques forment la dédicace que l'artiste Setsuko Nagasawa a utilisée pour son intervention au columbarium du Cimetière de Saint-Georges et pour introduire l'image du flot continu du temps et de la vie. L'artiste propose une version d'une rivière qui se dresse à la verticale, en une frise où vie et mort sont intimement liées, indissociables, comme les vagues entremêlées les unes aux autres. L'artiste tire profit du dos du mur du columbarium, qu'elle prolonge d'un « écran », à l'image d'un paravent ou d'un motif décoratif imprimé sur un mur, qui invite le visiteur du cimetière à se déplacer pour le parcourir sur toute sa longueur. La composition s'articule et se déploie comme une partition de musique : les ondulations des vagues figurent des portées et s'étalent de haut en bas, parallèles les unes aux autres, sans souci de perspective, conférant un aspect éminemment graphique à l'ensemble, tandis que la scansion de la séquence en stèles verticales suggère des mesures qui pourraient se répéter à l'infini. Afin de suggérer l'image de la rivière lente et silencieuse comme un Styx, l'artiste convoque les qualités plastiques de la céramique : évitant l'aspect domestique du carreau, l'artiste induit une dynamique par le recours à des plaques céramiques en forme de losanges, de longues stries obliques imprimant un lent mouvement à l'ensemble.
Yves Christen