Le travail de Shahryar Nashat englobe autant la vidéo, le film, la photographie que la sculpture. Le corps humain masculin constitue la clé de voûte de son travail : l'artiste a pour habitude de le fragmenter et de le restituer en très gros plan, qu'il soit en mouvement ou statique. Il s'intéresse aux mythes de la masculinité ainsi qu'aux dispositifs de monstration de ces derniers et tente de les démystifier. Depuis 2011, Nashat collabore régulièrement avec le chorégraphe Adam Linder et propose une contre-représentation du corps athlétique. Le travail de Shahryar Nashat a été récompensé à maintes reprises, et l'artiste a pu exposer dans diverses institutions dédiées à l'art contemporain, en Europe comme outre-Atlantique.
"High Definition Workers" repose sur trois composants : la temporalité, l'animalité versus l'humanité et l'image subliminale qui fait écho à la société de consommation. L'artiste est parti du contexte d'exposition, la gare de Lancy-Pont-Rouge, afin de construire son oeuvre. Le melting-pot d'images proposé happe l'attention des passant·e·s, et l'essence même des images, virtuelles ou réelles, est mise en avant dans la vidéo. Les figures réelles apparaissent et disparaissent de manière graduelle, parfois pixel par pixel, comme dans un dérangement de la transmission de l'image. Plusieurs effets visuels employés par l'artiste rappellent par ailleurs l'image radiologique et celle infrarouge thermique. La référence à ce type de procédés et à l'instabilité qui leur est propre révèle la structure interne de l'image. Pour l'artiste, le pixel serait « l'ouvrier silencieux » qui permet la création de tout type d'image. Le changement de régime d'image crée une rupture, ainsi qu'une surprise pour les usager·ère·s de la gare ; il faudra que ces dernier·ère·s prennent le temps de s'arrêter afin d'observer le passage du virtuel au réel. La perception du public est sans cesse mise à mal avec "High Definition Workers", une manière pour l'artiste de créer un moment de pause et de réflexion dans un contexte urbain particulier.
Roxana Voinea